lundi 23 octobre 2017

Le fou un peu plus



Je ne suis pas comme ça au départ. C’est après que c’est venu. Mais Franck ne se rappelle plus quand. Petit à petit il croit. Je suis du même avis. C’est venu à force d’écorchures. Les choses ont de moins en moins d’importance.
On lui a appris. Ça ne part pas de nulle part.

Je le revois petit et je l’imagine encore apprendre lentement alors que ce n’est qu’un enfant, apprendre qu’à l’extérieur de son corps l’environnement n’est pas favorable. Il vaut mieux rester dans un endroit où il ne peut rien lui arriver.
L’extérieur le bouscule beaucoup. Il s’en souvient aussi si je lui en parle mais je ne le ferais pas parce que c’est arrivé que ça lui donne envie de pleurer un peu. Et Franck est mon ami, alors je ne vais pas lui faire ça.
J’ai d’ailleurs parfois l’impression d’être davantage son père que son ami. Ça me met un peu mal à l’aise.
Je le revois quand il était petit. Je vois bien quand ça a commencer. Le corps s’adapte et l’esprit est une grosse boule de pâte à modeler. On lui dit que « Zut ! rho… » que « mais… Non !!!... » et aussi des « … Bon. Laisse ». Et je ne comprends pas toujours la violence des mots.
Mais parfois on le sort de sa bulle pour lui parler calmement.
On lui dit alors que ce n’est plus possible. Et qu’à partir de maintenant les choses vont changer.
Franck a entendu ces mots pour beaucoup de raisons. Dans sons éducation depuis qu’il est enfant tout à toujours foiré.
Il m’a dit un jour qu’il savait très bien que les parents se disputaient souvent à cause de lui. Ce qui l’a étonné c’est quand en lisant un bout du journal intime de sa mère, il a compris qu’il ne s’était pas trompé.

Un enfant ressent ces choses. Un enfant sait quand il aurait mieux valu qu’il ne vienne pas. Et un enfant sait quand il est préférable qu’il disparaisse. Mais il est trop petit pour être responsable de quoi que ce soit. Alors il obéit à sa mère et il joue.  

Le monde extérieur est très violent alors Franck apprend à ne pas l’écouter. Et son éducation commence à lui passer au dessus de la tête. Les mots et les réprimandes nombreuses le caressent au loin alors qu'il est lové dans sa tête dans la chaleur de ses histoires de monstres qu’il invente. Il entends les reproches. Tous. Il les a tous entendu. Les enfants ne sont pas sourds.
Si les enfants n’obéissent pas, ça ne sert à rien de parler plus fort.
Si un enfant ne suit pas les consignes ne penses pas qu’il est stupide.

Un jour un enfant ne t’écoute plus.  
Petit à petit un jour un enfant apprend à se déconnecter.
Un jour un enfant arrête d’écouter la violence du monde extérieur. Et tout fini par se ressembler. Et un jour toutes les violences finissent par être les mêmes.

Un jour un enfant finit par écouter uniquement ce qui se passe dedans. Et un jour un enfant arrête de raconter à l’extérieur ce qui se passe en lui. Parce que les gens sont déjà occupés à se disputer.
Et dehors c’est déjà suffisamment violent.

Parfois il a envie de pleurer. Mais je ne le fais pas. Parce que ça me mettrais mal à l’aise.
C’est flippant de voir un adulte pleurnicher comme un enfant de cinq ans.

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