mardi 23 juillet 2013

L'apostrophe

Avec Antonio, c'est bien simple. Tu as l'impression qu'à chaque fois qu'il te parle, c'est une confidence entre lui et toi. Peu importe qu'il y a ait du monde autour, quand il te parle c'est à toi qu'il parle, y a pas de doute.
Alors quand il s'approche de toi juste deux secondes, coupant le cercles des potes qui sont en pause avec toi pour venir te voir toi, tu prêtes une oreille attentive.
Normal.
Quand il est certain d'avoir toute ton attention, et seulement à ce moment là, il te dit doucement en t'apostrophant du doigt :
- "C'est un mec qui rentre dans un bar. Puis dans une chaise... et une table..."
Et là tu te marres.
Forcément.

dimanche 21 juillet 2013

Le bon coup

"… Je crois que je n'ai jamais joui".
Je me répète ces mots pour essayer de comprendre ce que tout cela veut dire.
Je ne sens pas ma fierté de mâle voler en éclat. Je n'ai jamais eu de fierté. Ou bien je ne la situe pas à ce niveau de mon existence. Et pourtant je sens le souffle du couperet, tout prêt de moi et je sais qu'il vient de trancher dans le vif de mon corps, quelque part, même si je ne sens pas encore la douleur.
Je voudrais dire quelque chose mais je ne trouve pas. Pourtant j'ai toujours quelque chose à dire d'habitude. Des choses élevées, spirituelles. Comme Dr House qui dit toujours des phrases que l'on ne comprend qu'au bout des quarante et une minutes de l'épisode. Je suis si philosophe.
Et là, rien.
Et je sais que ce n'est pas l'idée du mensonge en soi qui vient de me faire tomber.

Ce n'est pas non plus l'idée de ne pas être à la hauteur qui m'enlève les mots de la bouche. Le sexe s'apprend et je suis certains que chaque personne a sa propre façon de le vivre. Je sais qu'à chaque instant, l'entreprise nécessite potentiellement une totale remise en question. Et l'idée de ne pas avoir réussi ne m'embête pas outre mesure.
Ce n'est pas cela non plus.

Je ne dis toujours rien. Et je ne réfléchi même pas. Je reste coi.
L'idée de ne pas être à la hauteur ne m'a jamais dérangé. Dans le sexe, on peut apprendre. J'ai confiance en moi pour cela.
Sauf qu'elle m'apprend cela alors que l'on a rompu il y a peu. Et qu'avant, elle disait qu'elle était amoureuse de moi. Et qu'elle m'a dit qu'elle aimait baiser avec moi. Que je la "baisais comme une reine". Et que plus maintenant en fait, et c'est trop tard, parce que je ne pourrais plus jamais me rattraper. 
Elle et sa putain de vérité à tout prix. J'en fait les frais depuis plusieurs mois. Depuis avant que ça soit fini. Tout y est passé. Du plus petit mensonge au fameux ton pote en vrai c'est pas du tout ton pote.
Mais ça, le je crois que je n'ai jamais joui..., elle s'est gardé de me le dire. Évidemment. 

Il y a des mensonges douloureux parce qu'ils signifient forcément que vous êtes un idiot.
Idiot d'avoir cru en l'évolution du couple qui tendrait inéluctablement vers le mieux.
Idiot de penser qu'il y a des sujets sur lesquels on ne ment pas parce qu'il n'y a simplement aucune raison de mentir.
Idiot surtout d'avoir penser que je suis capable de mieux faire, alors que l'autre, pas du tout convaincu en revanche, n'a pas daigné me dire que je faisais un travail très moyen, préférant me dire en me tapotant la tête c'est parfait mon chéri, ne t'inquiètes pas....
Ce n'est pas grave, parce que de toute façon, je ne suis rien de plus qu'un mauvais moment à passer. 
Elle pourra toujours prendre un amant. 
Chouet. J'ai toujours rêver de tomber sur une femme assez compréhensive pour prendre un amant dans le pire des cas. 

Je lui réponds qu'elle nous a donc torpillé, purement et simplement. Qu'en fait, contrairement à ce que j'avais pensé, notre couple n'avait pas une chance.

Elle m'a déjà menti par le passé. Le mensonge, c'est quelque chose que je peux comprendre. Mais là je suis au téléphone, et je ne dis plus grand chose. Je pense à tout l'inutilité de certains mensonge et je reste incrédule au téléphone. Pendant le reste de la conversation, elle essaie de m'arracher quelques mots. Un si si... un oui, un non...
Je suis curieusement fatigué, à l'idée d'avoir lutter pour un couple qu'elle laissait mourir depuis le début. 


vendredi 19 juillet 2013

Le reste

- "… et ça ?
- … non...
- … Donc quand tu as dit ça, c'était pas vrai non plus ?...
- … si. Ça, oui...
- …
- Qu'est-ce qu'il y a ? Tu sais, si je te dis ça, c'est parce que je veux être honnête avec toi.
- …
- Et...
- Quoi ?...
- … il y a ça. Ça non plus ce n'était pas vrai.
- …
- Et si je ne voulais pas c'est parce que ce n'était pas vrai. Tu lui en a voulu pour rien. 
- ...
- ... Tu dis rien ?
- ... On avait pas une chance en fait.
- Si je te dis tout ça c'est justement parce que j'en ai marre de mentir...
- ...
- ... et je veux être bien. 
- … Tu nous a torpillé...
- Mais pour le reste, c'est quand-même vrai..."
Le reste...

mercredi 17 juillet 2013

Les cowboys solitaires

J'ai les yeux plissés par le soleil et le sable porté par le vent.
Je devrais rentrer mais j'attends.

On m'a dit d'attendre. Alors je reste assis sur le perron de cette vieille baraque en bois qui n'est même pas à moi. Je ne sais pas à qui elle est. Quelqu'un qui l'a acheté pour être tranquille je suppose, parce que depuis que je suis sorti devant la porte pour m'asseoir, et ça fait quelque temps, je n'ai jamais vu passer personne. Il n'y a tout autour de la maison que du sable. Ou du sel, je ne sais pas très bien. Quelque chose d'impitoyable pour quiconque chuterait à cause de la déshydratation. Quoique ce soit, ça m'est un peu égal puisque je suis juste sorti sur le porche pour attendre le retour de quelqu'un.

On a tous un fantôme qui nous a un jour dit d'attendre. Attends moi, je reviendrais. On en a tous un quelque part. Le tout est de savoir si on l'attend ou si on laisse tomber pour continuer, avec à jamais cette petite impression de ne pas avoir attendu.
À tord ou à raison.
On a tous un fantôme qu'on attends ou qu'on n'attend plus.

Ne pas attendre ? Pour que ce fantôme ne me lâche plus ? Pour qu'à jamais chaque pas que je ferais dans l'existence le soit grâce à cette "non-attente" ? Je tiens trop à ma liberté pour l'entériner dans une permission de ne pas attendre. Plutôt en finir.
C'est pour ça que j'attends. Pour rester libre.
Enfin, je me comprends.

Je regarde au loin parfois parce qu'il me semble avoir vu quelque chose, mais c'est toujours un mirage. Toujours. Je me fais toujours des idées dès que je crois qu'il approche quelque chose.
On a tous en nous un fantôme qu'on attend. Les yeux plissés par le soleil, sur le perron de notre baraque en bois mal foutue.
Il y a des gens qui n'attendent pas encore quelqu'un. Ceux-là n'ont pas de maison mal foutue. Ceux-là ne sont même pas là, dans ce désert. Je ne sais pas si on fini par être locataire d'une baraque mal foutue à force d'attendre..., ou bien si c'est parce qu'on habitait ici qu'on a fini par attendre qui que ce soit qui est parti, en espérant qu'il reviendra.
Je ne me souviens pas.

Je me souviens avoir toujours attendu. Et puis un jour, c'est un fantôme qui m'a dit de l'attendre parce qu'il reviendrait. Alors je me suis assis sur le perron, sur un vieux fauteuil en osier, les yeux plissés par le soleil. Et j'ai attendu.
Parfois je rencontre des voisines. À ma droite. Ou à ma gauche. À quelques dizaines de mètre. Pas trop près, pour ne pas gêner nos baraques mal foutue. On se parle. On échange un peu d'idées. Elle est assise sur un perron aussi. Elle attends un fantôme aussi. On en parle pas pour se laisser le loisir de nos conversations. Et puis à force d'attendre sur sa chaise, on parle de plus en plus fort pour se faire entendre. Au lieu de se rapprocher.
On comprend souvent mal ce que l'autre dit à une telle distance. Alors on fini par laisser la discussion s'étioler doucement et on détourne les yeux vers l'horizon parce qu'on croit voir quelque chose. Quelqu'un qui se rapproche. Un fantôme qui revient.
Mais c'est toujours en imagination.
Je ne sais même pas si j'ai bien entendu. Je ne sais même pas qui est sensé revenir. Je ne sais pas ce que je fais là à attendre.
Mais si je pars aujourd'hui, et que je rate l'occasion d'être heureux lorsque mon fantôme reviendra...
Et si je décide d'arrêter d'attendre, et que, à jamais tout ce que je ferais c'est d'avoir arrêté d'attendre...
Il va bien finir par passer quelqu'un sans baraque. À portée de voix. Quelqu'un avec qui on pourra se comprendre parce qu'on est assez proche.
Et là je n'aurais même pas l'impression d'avoir cessé d'attendre. Je ne penserais plus à ces fantômes qui n'existent pas.
Il faut juste attendre que passe quelqu'un.
Ça aussi.