lundi 26 novembre 2012

La chute le l'Empire

Quelqu'un pour me sauver. S'il vous plait.
J'etais un roque avant. Un cap. Que dis-je... Un cap. J'étais une pine insulaire alors qu'aujourd'hui loin des rêves de marin solitaire, j'ai regagné le continent, où m'amie m'attends en tablier pour manger à vingt-deux heure quarante cinq. 
Me voilà courbant l’échine devant la demoiselle qui perturbe mes mirettes. De la merde dans les yeux? Non. Du cake au fruits.
Jamais je ne me serais laisser arracher au petit bois de ma petite cabane rustique pour les frasques de la vie de ces couples qui se traînent  avec leurs maux, jusque dans les soirées entre amis desquelles on repart à une heure raisonnable. Et aujourd'hui je suis embarquer dans les "mais non chouchou que je n'ai pas dit ça pour dire ça" avec de la barbe a papa dans la voix. Tu sais bien que c'est toi la meilleure, dit-il presque par nécessité.
Comment me suis-je laissé prendre? Par une jeune femme dont les courbes ont fait pliés mes idées reçue jusqu'à me rendre mielleux parfois? Comment.

Je ne sais même pas si c'est du parjure. Si on dira un jour de moi que je me suis dévoyé a cause de la volonté de bien faire. Un nouveaux Franck plus accueillant oubliant toute son amertume sur son passage. Ou si je suis sur la route de mon salut.
Je pourrais leur répondre à ces détracteurs que j'ai peut-être aussi réalisé que l'important ce n'était pas tout ça, Que finalement c'est bien aussi d'être simple et bien, et que regarde plutôt le plus important. Je devrais leur dire vite à ceux qui me critiques, que je préfère à tout cela me pencher sur la raison première qui ferait de mon existence un véritable enfer: moi. Et que régler le problème de mon accomplissement me permet d'être doux à côté sans avoir l'impression de perdre ma grande guerre. 
Je voudrais me justifier en leur disant tout cela. Que je suis un agneau mais que je n'ai pas cédé! Et ils prendraient une leçon. 
Mais, alors que je m'apprête à ouvrir la bouche pour me défendre, je vois. L'enfer.
Contrairement à ce que disait Sartre, l'Enfer ce n'est pas les autres. L'enfer c'est Personne.
Personne pour me regarder avec pitié. Personne pour me cracher mon petit bonheur mielleux à la gueule. Personne pour m'invectiver. Pour me dire Franck, ressaisit-toi!
Personne pour trouver à redire au sujet de ça. Ces récents petits chamallow qui sautillent par dessus chaque mot quand je lui parle à elle.
Au contraire. Ils trouvent ça bien.

Ils sont heureux pour moi. Ils sont contents. Rassurés peut-être, même, que je fasse enfin parti de cette grande famille. Que je sois devenu tellement plus compréhensible.
Alors je garde mes arguments tout prêts pour moi, au fond de la gorge. Morts-nés, Fauchés par l'approbation de tous ou presque, en pleine force de l'age, toutes c'est raisons que j'avais préparées pour justifier de mon changement récent d'attitude. Mais à cause d'eux et de leur intolérable consentement, plus personne pour me demander des explications.
Et plus aucune raison d'expliquer pourquoi j'ai changer. 
Plus aucune raison d'expliquer en réalité qui je suis.
Et aucune raison d'expliquer pourquoi je ne le suis plus.

mardi 30 octobre 2012

Comme du ciment pour ne plus creuser

Il ne faut pas remuer le passer mon ami Franck. Il faut laisser les choses où elles sont.
Laisse décanter les choses comme la vase qu'on laisserait retomber au fond d'un bon verre de vin. Un vin doux-amère délicieux ou flotte tout un tas de morceaux de coquilles vides parce qu'il y a cette histoire d'omelettes sans casser des oeufs tout ça.

Avant j'aurais bien tout remuer pour laisser les choses prendre leur place comme ça arriverait sûrement. Mais le temps passe et ça ce sont des femmes qui me l'ont appris. Et le temps passe vite. Parfois même il est devant nos yeux.
Ça ce sont quelques femmes qui m'ont averti.
Parfois il y a une question d'enfant aussi. Et les enfants n'attendront pas. Ça aussi ce sont des femmes qui me l'ont dit.

Avant j'aurais bien remuer les bras fort, pour que de ce chaos se dégage quelque chose qui finirait bien par être compréhensible. Comme le petit artiste en culotte courte que je suis. Prétextant que le nature tant au déséquilibre permanent tu comprends et que de tout ce foutoir va bien se dégager quelque chose de clair et de bon.
Mais le temps passe. Ce sont les femmes qui me l'ont dit. Et je n'ai pas autant de temps que la nature, moi. Et il serait peut-être temps de me presser.
Pas pour un enfant. Pas pour un travail.
Ou je ne sais pas. Pour tout ça peut-être en vrai.

Alors des fois je me dis qu'il y a des questions qui resteront sans réponses parce que je comprends que le temps passe.
Je pense a ces femmes qui m'ont appris çela.
J'aimerais bien leur demander de m'expliquer comment. Pour savoir. Parce qu'elles avaient l'air de savoir plus que moi.
Mais a force d'écoute je me suis pris à essayer aujourd'hui de figer quelque chose à mon tour. Arrêter de courir. Je ne sais pas comment faire, parce que je n'ai plus ces précieux conseils et que moi je n'ai jamais vraiment su que le temps passait si vite.

Enfant.
Maison.
Travail.
Le bien-être d'une vie accomplie.

J'étais trop jeune quand je m'en suis aller. Et aujourd'hui j'essaie sans trop de point de repère de figer ma vie. De l'arrêter part endroit. Comme certaines femmes me l'ont appris.
Mais je ne suis pas sur de savoir.
Sauf que le temps passe. Ça je le sais. Parce que j'écoutais quand on me l'a dit.

Enfant.
Maison.
Travail.
Une vie accomplie.

Ne remue pas le passer a la recherche d'une leçon que tu aurais oublié mon ami Franck. Avance.
Le doute.
Mais avance. 
Ne remue pas le passer pour en attendre un conseil. 

mercredi 24 octobre 2012

Quand j'étais petit je croisais mes mains devant mon sexe comme pour le protéger




I

Elle regarde les gens par à-coups. En levant la tête et en la rebaissant vite pour ne pas qu’ils la regardent dans les yeux.
Pour ne pas qu’ils voient ses yeux en fait.

Elle parle de façon énergique pour détourner notre attention de ses yeux qui ne nous regardent pas. Une voix claire et agréable. On penserait parler à une femme dont le métier est de restructurer poliment des grandes sociétés en foutant des centaines de personnes à la porte. Une voix travaillée pendant ses études à Polytechnique.
C’est juste une femme qui a un œil paralysé. Il regarde droit devant lui. Froid et intrigant.
Elle a du se regarder dans la glace un nombre incalculable de fois, sous toutes les coutures pour apprendre à faire diversion. Un jour elle est sortie de la salle de bain plus découragée que d’habitude. Elle a dit pour elle-même avec une sorte de mépris espèce d’œil de caméléon.
Elle n’a plus jamais essayé de s’accommoder de son œil mort. Alors elle ne regarde plus les gens dans les yeux. Elle préfère baisser la tête le plus souvent.
Si on la regarde dans les yeux, parce que ça ne nous dérange pas, on voit sur son visage une nervosité à peine dissimulée. Alors on baisse les yeux avec l’impression d’avoir été impoli. Et elle restera avec la désagréable impression que son œil mort de caméléon l’isole chaque jours un peu plus du reste du monde.


II


Il y a une espèce d’affront dans ses yeux quand elle regarde son interlocuteur.
Pas un affront aguicheur du genre t’as vu comment il y a un truc entre nous, mais plutôt un truc du genre je fais volte-face parce que je connais ton espèce. Sur le coup je ne comprends pas tout à fait et puis au bout de quelques mots échangés je baisse les yeux sur un décolleté assez beau, tout juste mis en forme par un joli débardeur.
En relevant les yeux je comprends à l’expression qu’elle arbore de quoi il était question depuis le début. Un nouveau regard qui veut dire vous autres, les hommes, vous ne pouvez pas vous empêcher de mater ces deux protubérances comme des macaques. Pauvres petits porcs…
Une pointe de condescendance à mon intention.
C’était donc ça. Je suis comme tous ces mecs obnubilé par quelques centimètres carré de peau dévoilée.

Elle trouve cela méprisant. Elle n’arrive d’ailleurs pas à dissimuler son ressentiment. Elle n’a jamais réussi. Elle n’a en fait jamais voulu. Pour que ça ne devienne jamais une habitude de notre part. De mater leurs seins en toute impunité.
A chaque fois qu’elle est en face d’un homme à qui elle doit adresser la parole, elle n’est jamais vraiment à l’aise. Elle attend toujours le moment fatidique où l’homme va mater ses seins, comme un enfant un peu bête qui ne sera jamais tout à fait civilisé.
Elle n’est jamais à l’aise avec les hommes parce que tous les hommes sont comme cela. Et dans le cas où elle n’a pas percé à jour un de ces hommes, c’est parce qu’il est moins franc que les autres.
Elle se méfie de ceux-là encore plus.
Ceux qui la respectent.

Du coup, il y a quelque chose de curieux qui se dégage d’elle. Elle est en permanence sous contrôle. Et se dégage d’elle une sorte de certitude définitive qui a fini par la rendre un brun antipathique au fil du temps. Sous contrôle d’elle-même, persuadée d’être dans le vrai. Attendant systématiquement l’incartade. Attendant une faute qu’elle imputera non plus à un individu, mais bien à un sexe. Parce que les hommes sont des porcs. Et elle, elle le sait. Et cette certitude plaie à certains hommes. Cet affront les attire comme des mouches, renforçant le peu d’estime qu’elle a peut-être eu autrefois pour les hommes.
 Des singes savants dit-elle parfois. D’adorables petits singes qui sont tout juste bons à baver quand tu acceptes qu’il te paient un verre.
Tout juste bons à rentrer chez eux après t’avoir donné leur petit coup de leur petite queue. 

vendredi 24 août 2012

Les hommes aussi aimeraient qu'on leur offre des fleurs

Le vingt-quatre décembre.

Il est bien habillé aujourd'hui. Donc il n'a pas mis son tee-shirt à l'enseigne du magasin sans doute pour se laisser le temps de parader dans sa belle chemise. Pour en profiter un petit peu.
Un je ne sais quoi donne l'impression qu'il ne sait pas être élégant. Un peu comme le quidam moyen qui s'est habillé en vêtement du dimanche un autre jour que dimanche pour donner l'illusion qu'il est bien habillé en toute occasion, et qui toutefois ressent un certain malaise parce qu'il sait très bien qu'on est pas dimanche. Et ça le gêne.
Une sorte de fierté dans ses épaules anormalement droites peut-être. C'est objectivement un beau jeune homme. Au corps athlétique. Mais ses gestes manquent de naturel dans sa belle chemise.
Je lui dis que sa chemise est belle. Qu'elle est bien coupée. Il tente un sourire de merci, je sais mais sa fierté grandissant à l'instant me laisse entendre qu'un tel compliment est nouveau pour lui.
Le mec fière de parader en habits du dimanche fera comme ces enfants qui demandent à maman s'ils peuvent garder leur beaux vêtement encore un peu avant de les enlever. Il paradera pour mettre la vaisselle sale dans l'évier, il paradera pour aller à l'épicerie chercher un kilo de pâtes.Il paradera pour tout. Parce que tout le monde aime se sentir beau.

Il est caissier. Pas vraiment le lieu ni la fonction qui permette d'être mis en valeur. Et quand tu expose une reproduction de Van Gogh au milieu de calendrier de la Poste dans un intérieur de mauvais goût, ça fait l'effet attendu. Laid.
Laid mais aussi un peu ridicule.

Il porte une chemise et parade avec parce qu'il n'a pas l'habitude. Parce qu'on est au réveillon de Noël et que la grande surface nous a donné la permission de bien nous habiller pour l'occasion. Alors il a obéis. Et il a mis une chemise. Une chemise qu'il porte comme la reproduction du Van Gogh. Elle est belle. Au point qu'on aurait envie de la voir portée par quelqu'un qui sait porter une chemise.

Voilà. C'est souvent comme ça ici. Parce que c'est une grande surface. Parce qu'on bosse sur la "ligne de caisse". Et parce qu'il passera toujours dans nos mains du poisson et du déodorant sans alcool. Aucune chemise ne conviendra jamais. Et à chacune d'elle que l'on portera pour les Réveillons de Noël, on passera à jamais pour des éboueurs qui ne savent pas rester à leur place. A leur place près du poisson mal emballé. Celui qui fuit et que tu ramènes chez toi avec dégoût. 

samedi 18 août 2012

Le pays d'Oz


Je la jette comme une poupée de chiffon avec un seul bras sur le canapé/futon qui se trouve à un mètre. Elle est sonnée. Elle se recroqueville et alors que je fonds sur elle, elle lève les yeux pour me regarder. Je lui donne probablement ce qui est la plus grosse gifle que j’ai donné à quelqu’un.
Elle s’effondre sur le canapé et je crois qu’elle se met à pleurer.

Je sens la chaleur dans toute ma main. Une chaleur piquante. Je me dis qu’elle a dû avoir mal. Elle a d’ailleurs l’air sonnée.
Je pense j’espère que ça lui servira de leçon et je me dis que dans des circonstances légèrement différentes, je serais un enfoiré de bourreau. J’ai l’impression de naviguer dangereusement, mon comportement si proche de celui de ces hommes un peu trop testostéronés qu’il faudrait soigner à coup de castration. À aucun moment je n’ai senti une quelconque hésitation, à aucun moment, sur la réaction à adopter. Je sais avec certitude que j’aurais été plus violent encore s’il l’avait fallu.
Probablement un peu comme ces hommes testostéronés, d’ailleurs, forts de leurs propres certitudes. 
Le mec qui est avec nous s’est levé pour m’interpeler. Le ton de sa voix est incrédule même si, s’il avait voulu, avec sa quinzaine de centimètre et sa soixantaine de kilos de plus que moi, il aurait pu me faire volé tout comme je l’ai fait voler elle à l’instant. Je suppose que c’est l’incertitude qui l’a arrêté. Et quelque chose d’autre. Quelque chose de plus vindicatif au fond de moi.

Au pays d’Oz on oublie trop souvent  qu’il y a des sorcières. Je ne me souviens pas avoir déjà fait tomber une maison sur quelqu’un et je présume pareil des gens souvent. C’est pour cela que parfois quand au détour d’un verre, on part un peu loin, on est pris de crainte presque enfantine.
On a peur de la méchante sorcière de l’Est.
Pourquoi je te parle d’Oz ? Parce que quand on part un peu loin au fond du verre, on part souvent pour chercher un peu de courage, un peu de cervelle et un peu d’amour même si ça peut paraître hors de propos. Et comme les verres tombent plus vite que les tornades, ça arrive plus souvent qu’on ne le croit de se perdre nous-même, ou de voir quelqu’un, sans crier Gard, tourner de l’œil et commencer en pente douce sa longue descente sur la route de brique jaune.
Ça arrive et on le sait quand la personne ne regarde plus ce qui passe devant ses yeux, mais chante une petite chanson gaie et dépose son verre, commençant à tituber vers quelque part de pas très sûr. Un endroit de la pièce qui n’existe pas.

Elle pleure avec une main sur sa joue. Je la menace. Je lui ai dit plus tard que la prochaine fois qu’elle fait ça devant moi, je lui briserais le nez, et qu’elle aura mal, et qu’elle aura une cicatrice toute sa vie, et que comme ça, chaque fois qu’elle se regardera dans la glace elle repensera si tu veux faire ça, fait-le toute seule. Le mec avec moi dans la pièce s’avance timidement pour s’interposer. Son poids et sa taille lui permettraient de me stopper sans aucune manière  alors je lui dis sans plus d’explication qu’il ne l’a pas vu faire.

Parfois tu es obligé de suivre l’autre au pays d’Oz pour le ramener. Alors tu bois un peu plus juste avant parce que tu sais qu’il y a beaucoup de route et que tu n’es pas forcément préparer…
Je pourrais appeler ça comme je veux, mais au pays d’Oz, chacun cherche sa pépite d’or personnel, alors il n’y a pas de nom pour dire ce qu’il y a dans les yeux de l’autre quand je la vois s’avancer. Juste je lui dis de faire attention. Elle me répond du fond de son empire que oui oui. Mais quand on marche sur la route de brique jaune on ne peut rien promettre à personne. Parce qu’on veut juste rentrer chez nous. C’est pour ça qu’on descend le long de la route de brique jaune. Si en même temps, on trouve un peu de courage, de cervelle ou de cœur c’est pas plus mal, mais on veut juste rentrer chez nous. Elle me répond oui oui  comme cela. Avec la voix éloignée de celle qui est prêt du but.

 Ce que j’ai pris pour une colère débordante de vitalité doit être en réalité les restes d’une frayeur glacée qui a traversé tout mon corps plus violemment qu’une décharge électrique me rendant surpuissant. C’est probablement cela qu’a vu le mec qui est avec moi dans la pièce, au fond de mes yeux, plus qu’une certitude venant de je ne sais pas où.
Je me baisse au niveau de la fille et je lui dis qu’on y va. Elle me répond un oui franc. De toute évidence, avec ou sans moi, elle y va.
Elle est encore au pays d’Oz un peu.
Je me demande si j’ai bien fait. Et je me raccroche à l’idée que je n'aurais pu la laisser faire qu'au prix de ma propre santé mentale. N’empêche que quand elle s’est approchée de la fenêtre, elle avait l’air un peu plus libre. Et j’y pense parfois.

La liberté que l’on cherche parfois en prenant la route de brique c’est juste le fait de rentrer chez soi. Du courage, un cerveau ou un cœur, c’est secondaire quand on a que vingt ans et que déjà on veut rentrer. Le regard au loin, obnubilé par cette simple idée.
Elle s’avance pour regarder le ciel par la fenêtre.
Elle monte sur le parapet de la fenêtre. Il fait bon.
Elle a l’air éteinte. Et c’est parce qu’elle agit très lentement que je ne l’avais pas vu qui passait le deuxième pied derrière la rambarde. 

mercredi 27 juin 2012

En vrai c'est plus clair


Elle c’est qui ? bah euh, ma meuf.
(ça fait un peu bizarre de le dire mais bon. En y réfléchissant bien c'est ma meuf)

Parfois elle me dit qu’elle m’aime bien. Alors je lui réponds que moi aussi je l’aime bien évidemment. Normal. C’est ma meuf.
J’ai le droit.
Quand on est tranquilles tous les deux c’est bien. Plein de fois on s’engueule. Et là forcement c’est moins drôle. Mais bon. Les histoires de couple toussa. Mais ça m’ennuie pas. Parce que ça se construit une relation. Comme un putain de jeux de Lego de cinq milles pièces. Tu regardes la notice et parfois tu comprends pas tout, mais ça a l’air tellement kiffant que rien que quand t’as regardé la boite tu savais que tu vas galèrer mais tu l'achète quand-même.
Parfois tu galères. Mais bon.

Parfois, dans un momnet tendre, elle me dit qu’elle m’aime bien. Alors moi, pour lui prouver ma sincèrité je lui ai acheté du gros sel. Pour les pâtes. Comme ça elle en aura chez elle.
Je sais pas si le message est passé.
Alors je lui ai dit que oui, y a aucun soucis pour qu’elle laisse une brosse à dent chez moi. Mais je l’ai dit avec le ton du mec qui est carrément d’accord tu sais. Le genre vraiment mais carrément laisses une brosse à dents meuf, y a trop pas de soucis.
Je sais pas si ça a été assez clair.
Alors elle m’a redis qu’elle m’aimait bien.
Alors j’ai dit je sais. Parce que je crois que oui, je commençais vraiment à croire que je savais. Tu te rends pas comptes de ce que ça veut dire.
Elle non plus apparemment.

Un jour elle m’a dit même qu’elle m’aimait vraiment bien. Alors j’ai dit je sais parce qu’on se détache pas de nos vieilles habitudes un peu nases. Et puis j’ai rajouté que moi aussi je l’aime bien. Et puis je me suis souvenu qu’elle savait peut-être pas, alors j’ai rajouté vraiment bien. Pour qu’elle comprenne.
Et puis elle l’a redit. Comme si j'avais loupé quelque chose.
Et je lui ai dit que j’avais l’impression que quand je le disais ça sonnait un peu nul. Elle a dit oui. Elle a dit qu’elle avait la même impression quand je le disais.
Je lui ai dit que c’est parce que je ne sais pas dire ces trucs là mais l’argument n’a pas eu l’air de porter beaucoup. Je lui ai dit que ça ne voulait rien dire que je sois pas à l'aise, parce que je le pensais quand-même (après tout, je lui ai acheté du gros sel pour dans ça cuisine. Et ça on dirait qu'elle l'oublie vite...).

Une fois, on m’a acheté de l’huile d’olive. Et j’ai trouvé classe. Alors du gros sel… (et de la tomate concentrée – l’argument est passé comme si de rien n’était d’ailleurs, si je peux me permettre de le faire remarquer).
Du coup, juste après son je t’aime vraiment bien je lui ai dit que je ne savais pas faire ce genre de déclaration, mais que c’était pas grave pour moi, parce que ça ne m’empêcherait pas de vouloir me faire chier pour sa gueule.
>C’est passé moyen.

 Je l’ai senti au silence vide qui a suivi ma déclaration. Alors je lui ai expliqué.

C’est gentil de vouloir se faire chier pour la gueule de quelqu’un. Et moi, je sais peut-être pas dire les choses, mais tu vois, au moins j’accepterais carrément de me faire chier pour ta gueule. Tu comprends ?

Je sais pas si elle a compris.
En tout cas elle a eu l’air de faire des effort pour accepter le fait que c’était gentil ce que je lui disais.
C’est ça que j’aime bien avec elle.

Et justement, c’est pour ça que si y avait besoin, je me ferait chier pour sa gueule tu comprends ?

dimanche 8 avril 2012

Les garçons l'appelaient naïade, et je devrais grandir aussi.


Entre eux, secrètement, les mecs l’appellent bouche à pipe. Parce que faut l’avouer, c’est le genre de fille qui te donne envie de t’asseoir en face d’elle avec un bon coussin sous le cul et le lui mordiller les lèvres délicatement, à l’infinie, tellement elle a la bouche pulpeuse. 
La bouche qui crie braguette. Oui. C'est un peu ça.
Moi j’aurais pas vraiment pensé à ça à l’époque où on lui a donné ce surnom, au collège, parce que j’ai toujours mis plus de temps que les autres à m’éveiller à toutes ces choses. mais j'avoue, aujourd’hui, depuis un certain temps, je la regarde plutôt entièrement à chaque fois qu’elle m’adresse la parole.  Et pas que sa bouche. S’ils avaient attendu juste un peu plus de temps après le collège, ils l'auraient finalement affublé d’un autre surnom du genre « corps de rêve qui donne envie de s’attarder sur tous les plaisirs de la chair, avec une bouche à pipe aussi, mais qui va délicieusement avec le reste de sa personne » ou un truc comme ça, parce qu’il faut avouer aussi qu’elle avait un corps sublime de danseuse de morderne-jazz. En un an, entre le collège et maintenant, c’est bien ce qu’elle est devenu. Une superbe… superbe jeune femme.
Quel dommage que sa plastique ne lui ait empêché de montrer à qui voudrait l’entendre l’étendue de sa perspicacité (par là où les garçons la regardaient, il n’entendent évidemment pas grand-chose).
Et c’est bien de ça dont il est question aujourd’hui. Elle me parle de ce looser (puisque tout hétérosexuel mâle normalement constitué nommerait looser celui qui laisse tomber ce genre de jeune femme alors qu’elle est éprise de lui) – qui, effectivement est un nase – qu’elle n’arrive pas à oublier et me demande mon avis.
Elle me demande à moi, sans pudeur, malgré le fait que nous ne soyons pas à proprement parlé des amis déclarés, pour deux raisons. La première est que nous nous sommes toujours inspiré un respect mutuel depuis que nous avons été dans la même classe, au collège. Que nous nous aimons bien, et que, si je pense que nous ne correspondons pas exactement aux critères de l’autre pour quelque raison que ce soit, je pense pouvoir dire néanmoins qu’il y avait en nous une espèce d’alchimie que je n’explique pas. Mon alchimie à moi, je le crains, n’étant pas aussi subtile que la sienne.
La deuxième raison est probablement que ma sœur et elle font de la danse ensembles. Activité qui est à l’origine, je l’apprendrais dans cinq minutes, de beaucoup de discussions fortement développées sur des sujets aussi singuliers d’imprévisibles. Et nous savons tous que les discussions, au cours de ces séances de hammams intellectuels, se transforment souvent en confidences. Et ça créé des liens forcément. Liens dont je fais les frais en ce moment même sans le savoir. Je remercierais ma sœur longtemps en rentrant après cette journée.
La troisième raison est que nous sommes le trente juin, que nous sommes au dernier jour de notre année de Seconde, et que le soleil éclatant se reflète sur une eau magnifique d’un lac magnifique, autour duquel tout le lycée se réuni traditionnellement le dernier jour d’école, et que nous somme saouls depuis quinze heure et ravis d’être tombés l’un sur l’autre par hasard.
Je ne sais pas très bien les mots que j’emploie pour lui parler d’elle, de sa relation avec lui, de lui – que je connais un peu – , mais il semble que l’impact sur elle soit inattendue (et pourtant, je suis du genre à attendre beaucoup de l’impact que j’ai sur les gens).Elle « réalise enfin… ». « Ce mec  est un con. » Très probablement, oui. Il semble que je sois pendant quelques minutes un génie. Cool. Mais il y a mieux : elle veut que pendant notre ballade autour du lac, nous passions dire bonjour à une de ses amies qui se trouve grosso modo dans la même position qu’elle il y a encore deux minutes. Elle veut que je lui parle aussi. Elle veut que je la réveille comme je viens de la réveiller, elle. Parce qu’elle trouve que j’ai vraiment raison, que mais oui ! mais c’est ça… et que c’est dingue comme je viens de lui faire prendre conscience de quelque chose.
J’en suis d’autant plus ravi que mon Ego est doublement flatté. D’une part par l’éloge dithyrambique  qu’elle fait de mon analyse et d’autre part parce que sa copine que nous allons voir prestement est d’une beauté tout aussi remarquable et désirable d’une tout autre façon mais non moins intensément que ma collègue de cet instant. Et qu’il y a peu de choses équivalentes à l’éloge qu’une femme sublime fait de vous à une autre femme sublime.
La gratitude et l’alcool, sur le chemin, la mettent à l’aise à mon endroit… et voilà qu’elle commence à me parler plus ouvertement. D’elle, et de moi. Rien de très entreprenant, puisque je l’ai dit tout à l’heure, il n’y a mystérieusement aucune ambigüité entre elle et moi. Ce qui ne m’empêche pas de prendre l’agrément comme il vient. Elle trouve incroyable qu’il y ait encore des garçons comme moi, des garçons qui ne pensent pas avec leur bite, elle trouve bien qu’il y ait encore des garçons qui peuvent regarder une fille sans faire de probabilité sur leur chance de se la taper. Elle trouve rassurant qu’il y ait encore des garçons qui ne cherchent pas systématiquement à séduire ou qui ne voient pas chez une jeune femme que le corps qui l’enrobe. Qu’il y ait des garçons qui soient encore capable, comme moi, d’envisager une fille comme une personne, au travers ce qu’elle pense et ce qu’elle a à dire.
(Je te laisse une minute pour sourire, salaud)
Mais il est vrai qu’à l’époque j’étais comme ça. J’étais de ceux qui ont été baignés par beaucoup de principes, et qui s’y sont réfugiés parce que  j’avais comme eux oublié en route d’acquérir le courage de draguer toutes les jeunes femmes dont je rêvais secrètement. Je n’avais pas encore acquis un peu de cette assurance superficielle qui rend quelque chose de médiocre sublime grâce à l’aplomb que l’on possède en en parlant. J’avais au sujet de ma personne cette humilité qui n’a rien d’une qualité puisqu’elle résulte simplement d’un manque. Manque de confiance en moi, manque de conscience de ce que j’étais alors… je suis un ramassis de  complexes et d’espoirs inextricablement entremêlé dans un corps qui se trouve objectivement pas très beau. J’étais ça, et je ne croyais pas réellement que de cela puisse s’extirper quelque chose de séduisant.
Elle est enthousiaste depuis une bonne vingtaine de minutes maintenant. On a croisé sa copine qui nous a dit qu’elle repassera tout à l’heure parce qu’elle a un truc à faire. Et elle reprend à mon sujet. Elle finit par me dire comme pour appuyer ses dires (qui selon moi n’ont nullement besoin d’être appuyé, évidemment) que c’est ce que ma sœur leur a dit un jour en cours de danse. « elle nous disait une fois que ce qu’elle trouve bien chez toi c’est que tu n’as pas une bite pour plaire… et c’est vrai ». C’est rare semble-t-il. Chouet. Je te passe le doute qui m’assaille lorsqu’elle me dit ça, parce que je ne comprends pas trop ce que ça veut dire (je te l’ai dit tout à l’heure, je suis légèrement attardé concernant tout ce qui est question bite et tout ça), mais je suppose que c’est élogieux puisque c’est ça qu’elle fait depuis tout à l’heure. Me congratuler.
Pendant qu’elle me parlait, au fond de moi, comme pour salir l’espoir qu’entrevoit ma pote « aussi séduisante qu’un premier jour de vacances d’Eté » je sens monter comme un doute. Comme une injustice faisant naitre l’intention nouvelle de réparer une grave erreur.
Parce que malgré tout ce qu’on dira, ma collègue de ballade de cette après-midi est sublime. Et c’est à cause de son corps incroyablement bien dessiné que les garçons n’ont pas vu qu’elle est pourvu aussi d’un esprit vif.  Qu’ils n’ont pas vu que sa bouche, responsable de ce surnom grotesque de « bouche à pipe » lui sert aussi à dire des choses très intéressantes, à se révolter, à pousser des cris du cœurs charmants. Et ce, même si cette bouche donne aussi envie qu’on la goutte en glissant ses lèvres entre les nôtres.
C’est donc pendant qu’on se dit au revoir que je me promets qu’un jour, j’aurais le courage de  rendre hommage entièrement à ce genre de femmes. Non seulement aux idées qu’elles expriment, mais aussi au corps qui les meut.

Je repense à son « … ta sœur disait : mon frère n’a pas une bite pour plaire. Et c’est vrai… ». C’est vrai. Mais pour combien de temps ? Et qui est à l’abris de penser avec sa queue un jour ou l’autre ? Même les femmes pensent avec leur bite.

Je repense à cette sorte de compliment : je ne pense pas avec ma bite, et en cette fin d'après-midi, au soleil de juin, je pense paradoxalement qu’il serait peut-être temps de m’y mettre.

samedi 10 mars 2012

Bonjour Kitty


Elle n'est pas vraiment jolie. Le crayon noir renforce les traits de ses yeux parfois même en cachant ce qu'il reste de cernes d'une vie bercée par un travail à la con.
Elle n'est pas réellement bien faite. Un peu trop tassée sur elle-même et une démarche un peu pataude, comme souvent chez ces jeunes gens un peu mal à l'aise dans leur corps.
C'est quand elle sourit qu'elle nous rappelle parfois à quel point elle est jeune et de son sourire et de sa gestuelle rayonne dans ces moments-là une sorte de fraicheur qui éveille l'envie.
Et dès que le sourire s'en va de son visage, on y retrouve instantanément cette sorte de fatigue.
Et pourtant.
Je t'ai déjà parler de ces détails qui rendent les gens merveilleux. Pas les détails qui sont en fait des choses très importantes. Des détails.
J'ai connu quelqu'un qui était toujours calme. Chiant mais calme. Passer une soirée avec lui c'était comme passer une semaine à Center Parc. Et je sais pas si t'as vu les tarifs.

Hello Kitty (puisqu'elle me fait un peu penser à elle) a ce genre de pouvoir.
Mais elle ne repose pas.
Elle ne te paie pas toujours tes coups à boire.
Elle n'est pas vraiment chiante tout en réclamant souvent en plein milieu des discussions une sorte attention subite sous couvert d'anecdotes tournant autour d'elle. Typique d'un échos d'une adolescence pas tout à fait terminée.
Mais voilà. Hello kitty possède le décolleté le plus beau qu'on a vu depuis longtemps. Un décolleté qui projette ses seins magnifique hors de leur perchoirs et qui débordent malgré elle jusqu'au bord de ses tee-shirts colle en "V".
Lorsqu'elle se met en tee-shirt, le décolleté d'Hello Kitty, je le jure, est infiniment plus beau que Regardez-moi dans les yeux... j'ai dis les yeux.
Et ça, ça lui confère un statut unique.

Un détail pas important. C'est vrai.
Mais ça rend Hello Kitty tellement unique. Tellement.

jeudi 16 février 2012

Si tu me vois, laisse un message

Je me dis sans même m'en rendre compte que là en fait, j'ai envie de rentrer le plus vite possible...

Ça fait vingt minutes que je suis là et je ne sais plus où regarder pour m'occuper. Salut par-ci, salut par là. Un "hey, mec!" Jeté avec enthousiasme a un pote qui est là aussi. Rentrer. Surtout.
Je parle à la nana de mon pote quelques secondes. La soirée est tranquille. Même que certains spectacles sont franchement biens.
On se capte entre deux installations. On est content de se voir, même deux secondes. Mais même nos regards se demandent pourquoi on joue à ça. Ça fait longtemps aussi. C'est pour ca. On a perdu l'habitude de l'affection de proximité.
Rentrer le plus vite possible.
J'ai des clopes. Du coup je les laisse entre eux une dizaine de fois pour aller dehors. Ces quelques cigarettes ont le goût d'une liberté enfermée et qui étouffe. Je respire ces clopes comme un prisonnier claustrophobe qui regarde le ciel au travers une petite lucarne. Rentrer le plus vite possible. Parce que j'étouffe ici.

Le rendez-vous était pour ce soir. Quand j'arrive, je les vois au fond du cabaret, entre eux. On essaie de  réchauffer le plaisir de se voir avec une poignée de main un peu trop chaleureuse. On attend presque la sonnette du four à micro-onde pour nous dire que ça y est, c'est chaud. Ça ne marche pas beaucoup.
Rentrer. Le plus vite possible.
Mon lit m'attend. Aucune contrainte avec lui.

Après le spectacle final et les derniers applaudissements, une heure après mon arrivée je lui glisse dans l'oreille que "mec, j'y vais". A cause des métros... ou peu importe. On me crois. On comprend. C'était sympa de se voir.
Ouai. Si seulement je ne ressentais pas une gravitation surpuissante m'enfoncer dans le sol à chaque pas.

Sur le chemin du retour je sens le malaise se dissiper à mesure que mon appartement se rapproche. Il est cosy. J'y serais bien. Et puis ils pensent tous que je suis occupé ce soir. Temps mieux.
Je descends du métro. J'ai déjà mes clés dans la mains. Ma rue me semble étrangement affectueuse. Comme si j'étais parti depuis très longtemps.
Ouvrir en bas. Monter les escaliers étroits. C'est bientôt fini.
Ouvrir ma porte d'entrée.
La refermer.
Poser son manteau sur le lit. S'allonger a coter. Et s'endormir. Vite.

mardi 31 janvier 2012

Respecte ma puissance pouffiasse...

Cela fait plusieurs années que je me réserve dans absolument toute occasion une fourchette bien particulière qui orne de sa magistrale originalité mon service de table.
Ce soir encore, je l'ai lavé exprès pour manger avec. Je l'ai repéré dans l'évier. Il y en avait d'autres. De belles fourchettes (j'ai toujours pris soin de volé à mes parents ou dans les cantines, adolescent - déjà - de beaux couverts. Solides. Qui tiennent en main) me faisaient de l'œil. De ces fourchettes qui prennent un maximum de riz pour le mettre dans la bouche et manger à la façon des gloutons les plus primaire, et en ça respectables que l'on puisse imaginer. Et à cinq heure du matin, ivre de tout mon être, et à jeun de toute la journée, ce n'est pas un luxe.
J'ai pourtant choisi cette fourchette. Une fourchette au combien moins efficace.
Une fourchette plate.

Ça fait des années que j'ai pu expérimenter l'absence totale d'aspect pratique de cet objet et pourtant, j'y reviens toujours. Comme pour m'imposer son originalité comme quelque chose de divin. Un truc délicieux. Une amertume instructive.
Je crois pouvoir dire sans trop m'avancer que très peu de gens ont déjà manger avec une fourchette plate. Toute plate. Pas seulement au col, mais aussi plate autant qu'on peut l'être au niveau des dents.
Autant manger avec quatre aiguilles à coudre attacher à une cuillère en bois.
Cela fait des années que j'aime cette fourchette. Son manque de pratique n'en est pas vraiment la raison, encore que. Peut-être que c'est exactement la raison qui me pousse toujours à aimer cet objet fruit de l'homme que je suis devenu à un moment donné.

Je suis tout puissant et toute chose qui vit dans mon royaume se soumettra à ma volonté. Tel est le monde dans lequel je vis et tel sera le monde à jamais. Aussi dès qu'il a été question de frustrations intolérables, j'ai commencer vers l'age de huit ans à vouloir exprimer ma colère divine. J'ai donc entrepris comme tout enfant détestable de cet age à casser mes jouets.
Pour punir les autres par les privations dont je devenais la victime. Pour ça. Ça et bien entendu pour exprimer mon incommensurable fureur bien trop précieuse et délicate pour être tut.
La privation qu'un enfant s'impose est dans les premières années de son existence une chose si terrible et si déchirante qu'elle doit très certainement pense-t-il être insupportable à vivre pour les autres.

À l'age de dix ans j'ai vécu ce que j'ai longtemps appelé en moi-même la Première Grande Analyse (j'eus malheureusement l'occasion bien après cela de prendre conscience de nouvelles fois de l'étendu de ma stupidité lors de situations très spontanées dans le temps).
Pour une raison oubliée depuis longtemps maintenant je me souviens être monter dans ma chambre en fureur. Sa majesté Moi ne supportait pas quelque chose (à postériori, cette chose, je présume aurait dû, de fait, certainement être insupportable pour quiconque aurait connu même situation). C'est donc très naturellement et avec toute la légitimité du monde que l'enfant tout à fait réfléchi que je devais être à cet instant pris cette voiture volante que j''aimais par dessus tout à cette période et lui arracha les deux ailes de plastiques en deux coups violents et absolus, symboles de mon engagement entier pour ma propre cause. Entiers et absolus, pas tout à fait puisqu'à peine avais-je estropier cette voiture demi-volante que je me souvenais l'avoir saisi avec regret en me disant que j'allais regretter ce qui était sur le point de se passer. Et c'est avec l'écœurement de celui qui vit une sensation forte juste un peu trop longtemps que j'exécutais la seconde aile de la voiture tout à fait normale à présent (bien que dorénavant dépourvu à jamais d'essieux arrière). Je l'ai balancé contre le mur et elle n'a même pas eu le temps de toucher le sol que je lâchais déjà un souffle de regret à cause de ce que je venais de me faire en me privant de cette voiture absolument géniale au demeurant. Je restais là un instant en regardant les débris sur le sol en espérant que je ne regretterais pas autant que je le supposais.

Aujourd'hui je mange avec cette fourchette d'une parfaite originalité puisque chez personne je n'ai vu de fourchette similaire. Qui en aurait voulu en même temps. Évidemment.
J'aime cette fourchette comme on aime une vieille montre à gousset qui nous rappelle un peu désagréablement il faut l'avouer que le temps passe inéluctablement à chaque instant.
Je respecte cette fourchette comme on respecte ces bons conseilles qui nous ont été jetés à la gueule par quelqu'un de plus avisé que nous, à un moment peut-être peu glorieux de notre existence.
J'aime cette fourchette façonnée par moi parce qu'elle est mon fruit et qu'elle ne sera jamais moins pratique à utiliser que depuis le jour où parce qu'elle m'a fait l'affront de tomber de mon assiette, je l'ai aplati violemment d'un coup impitoyable de pied pour l'écraser au sol.

J'aime cette fourchette pour cette raison. Tellement le symbole de ma divine colère. Tellement le symbole de conséquences qui devraient vous servir à tous d'avertissement. Tellement le symbole de ma toute puissance et tellement pas pratique que cette fourchette plate avec laquelle je galère à manger à chaque fois.